
Pour les dix ans du club, la
décision de faire une sortie l’été est prise. La Bretagne est
choisie car complètement inconnue, et Pierre Phélipot se propose
gentiment de nous guider sur les petites rivières de l’Isole, du
Ster-Goz et de l’Aven.
Notre gîte,
le moulin de Kerchuz se trouve en plein milieu de la forêt juste à
côté de l’Isole.
1er jour
Après s’être installé dans le gîte la veille au soir, il s’agit
alors de faire une prospection de la rivière et du biotope. L’Isole
est une rivière peu large qui possède aussi une eau légèrement
teintée caramel. La rivière est aussi très sauvage, de ce fait la
petite balade entamée en bermuda se transforme après un aller-retour
au moulin en véritable expédition avec pantalon et chaussures de
montagne. La rivière particulièrement isolée est aussi très
difficile d’accès.
En fin
d’après midi le groupe se divise en deux : un groupe reste sur
l’Isole, un autre part sur le Ster-Goz.
Dans
l’attente du coup du soir une reconnaissance du Ster-Goz est faite,
la rivière s’avère aussi large que l’Isole mais encore moins
profonde et seul des truitelles sont observées, cependant de
magnifiques postes sont repérés et on note aussi un entretient
exemplaire de cette rivière et de ses rives.
Pour le coup
du soir le groupe du Ster-Goz décide de s’approcher du lieu de
rencontre entre l’Aven et le Ster-Goz juste à coté d’un pont.
La fin du
coup du soir approche et seul une truite maillée est prise (et
relâchée). Les pêcheurs se regroupent sur une roche dépassant de
l’eau entre les deux tuyaux permettant l’écoulement de l’eau sous le
pont. Soudain un mouvement inhabituel de l’eau est observé ce qui
suscite l’intérêt des pêcheurs. Après s’être levé c’est un poisson
de cinquante centimètre avec une magnifique robe bleue argentée et
avec une queue immensément grande que nous admirons : un Castillon
en train de remonter la rivière…Nous sommes au pays du saumon…
2ème
jour
Cette journée commence paisiblement,
le
groupe attend impatiemment l’équipe de tournage qui va nous
suivre jusqu'à la fin de la semaine ; équipe qui rassurez-vous
se résume à deux personnes : Erwan et David (voir l’article :
vidéo sur la Bretagne).
Pierre
Phélipot nous met en contact avec Jean-Pierre Morvan, monteur
semi professionnel.
Il monte
uniquement des mouches en lièvre, et nous subjugue lorsque il
nous montre ses séries (plusieurs centaines) de mouches
parfaitement identiques. Il nous donne aussi quelques astuces de
montages pour les collerettes en lièvre.

Le coup du
soir se fait avec Philippe et Julien sur la partie Amont de la
rivière. La pêche du poste réserve beaucoup de surprises, même si
les truites ne sont pas celles que l’on rêve de pêcher, elles
nous accordent toutefois des combats surprenants.
La pêche
dans ce type de rivière est très formatrice car les gobages observés
sur l’eau sont très rares ; il faut donc inciter la truite à mordre
par le passage de la mouche artificielle. Pour cela il faut réussir
à lire l’eau, essayer de trouver l’endroit précis où se poste la
truite pour provoquer l’attaque.
La soirée se
termine par une partie enflammée aux jeux de cartes …
3ème
jour
Le soleil caniculaire nous oblige à attendre le coup du soir.
L’après midi est occupée par la construction d’une hutte à
sudation ; sorte de cabane qui a comme principe de retenir la vapeur
d’eau produite par l’évaporation de l’eau de la rivière sur des
pierres chauffées dans un feu.
Au coup du
soir le groupe se divise de nouveau en deux. Un groupe reste sur
l’Isole et un autre part sur l’Aven. C’est une rivière magnifique
qui s’offre à nous, entre un bois et une plaine, juste a coté d’un
moulin isolé…belle image onirique... Une fois encore la truite est
au rendez-vous. Philippe casse même sur une belle truite qui n’aura
pu prouver sa puissance que sur le départ qui a été fulgurant.
La soirée se
termine avec un intervenant : Gilbert Duigou est responsable de la
gestion du Ster-Goz, il fait un exposé où il nous explique les
enjeux économiques, la difficulté à trouver des fonds pour gérer une
rivière, les différents travaux effectués et enfin les différentes
études menées pour rendre compte de la population de castillon et
des zones de frayère.
4ème
jour
Mauvaise surprise dès le réveil, la pluie est tombée toute la nuit,
et l’eau de la rivière devenant boueuse ne nous permet plus de
pêcher. Une légère éclaircie nous permet tout de même de tester la
hutte à sudation. Le beau manteau végétal faisant office de toit
n’est pas étanche et donc ne permet pas le bon fonctionnement
de la hutte. Ainsi la belle paroi de verdure se transforme
rapidement en un amoncellement de draps-housses et miraculeusement
la hutte marche parfaitement…
Encore
miraculeusement, l’eau du Ster-Goz malgré la pluie ne change pas ce
qui nous permet de faire un coup du soir où Pierre-Olivier et Julien
prendront leurs premières truites à la mouche.

5ème
jour
Force est de constater que nous sommes le dernier jour. La pêche
dure toute la journée ; Avec Philippe l’idée un peu folle nous prend
de descendre à pied jusqu'à un moulin plusieurs kilomètres plus bas
en passant par la forêt pour ensuite pêcher en remontant ; Et avec
le recul il est certain que le plus marquant fut cette marche dans
l’inconnu, dans cette nature vierge, avec comme seul guide le bruit
de la rivière à notre gauche. Alors que notre corps a été éprouvé
durement pendant une semaine, que l’épaule ne supportait même plus
le poids de la canne, une sorte d’énergie en réserve nous poussa
vers cet inconnu, nous aurions pu marcher des kilomètres durant…
6ème
jour
Le train est en fin de matinée. La nostalgie par anticipation nous
prend et dès le levé du soleil on se retrouve au bord de l’eau pour
profiter du lieu et de la plénitude qu’il nous apporte…dernières
truites remises à l’eau, derniers moments de bonheur…
Nous nous en
allons la tête pleine de souvenirs inoubliables, la preuve en est
cet article rédigé presque un an après la sortie.
L’envie de
renouveler ce type de séjour se fait de plus en plus pressante.
Qui mieux
qu’un jeune pourrait raconter notre séjour. Voici donc le voyage
conté par Rémi, pilier du club et excellent monteur à la mouche :
« Durant
l’été 2004, nous sommes partis sur l’isole, dans un petit moulin au
bord de l’eau. En arrivant sur les lieux, je trouvais que les
rivières étaient toutes petites, je n’avais jamais pêché sur des
rivières aussi petites. Je fus assez dérouté, les rivières ne
dépassaient que rarement une dizaines de mètres de large et la
végétation y était très présente : il se formait comme un toit au
dessus de la rivière. Les poissons étaient proportionnels à la
largeur de la rivière. On ne nous avait pas dit avant de venir
qu’une truite de 25 cm était un record pour la région.
Au bord de
l’eau, nous apprenions à pêcher dans ces petites rivières. J’étais
souvent accompagné de Julien. Je devais en fait aider les jeunes qui
débutaient la pratique de la pêche à la mouche. Tout au long de
l’année, je leur avais appris à lancer le mercredi après midi sur
l’étang de Bury, je leur avais aussi montré comment fabriquer leurs
propres mouches. Ce voyage sur l’isole était un peu comme un
aboutissement de cette année au bord de l’eau. Le voyage était en
parti payé par le lycée, ce qui montrait un peu en quelque sorte la
reconnaissance de ce que j’avais fait pour le club de pêche. Ma
tache était de « guider » les jeunes au bord de l’eau, je devais
leur faire prendre leurs premiers poissons.
Le premier
jour de pêche, un groupe fut envoyé sur le Ster Goz, pour découvrir
des coins de pêche plus accessibles que ce que nous avions devant le
gîte. Je fus envoyé avec mon frère, Alexis et Remy sur ce
magnifique petit coin de pêche. Nous avons eu une dure journée. Bien
que nous ayons sillonné la rivière sur des kilomètres, nous ne
voyons presque pas de gobages, du moins aucun poisson sur un poste
fixe avec des gobages réguliers. (Comment accompagner quelqu’un
quand on ne voit pas un poisson à l’horizon…). Les poissons étaient
difficiles à prendre, sur les gobages que nous voyons. Rien. Je me
souviens d’un gobage c’est peut être la seule chance que nous ayons
eu. Nous étions regroupés près du pont où nous avions garé la
voiture, et nous pêchions vers les piliers du pont. A ce moment, un
sillon sortit sous le pont. Et c’est alors que passa sur un banc de
sable un poisson d’une cinquante de centimètres. Il possédait des
reflets gris bleutés. Il eut un blanc, tout le monde s’arrêta de
pêcher puis l’un d’entre nous reprit « c’est un saumon !! », quelle
sensation, de voir ce poisson sauvage à quelques mètres de nous. Il
est resté quelques secondes devant le pont puis a disparu. Pourtant
c’est comme si il était resté bien plus longtemps. La vue de ce
poisson a un peu éveillé chez nous ce rêve fou du pêcheur de saumon.
Par la suite nous avons fait des sorties de pêche sur l’Aven pour
pêcher le saumon : Philippe en a vu un monter sur sa mouche, Alexis
quant à lui en a touché un pendant quelques secondes avant de se
faire démonter par la force phénoménal de ce migrateur. Je crois que
si on leur parle de ce souvenir il y a un frisson qui les traverse.
J’ai entendu
dire qu’avoir un saumon au bout de sa ligne c’est avoir la même
impression, que si du 220 volt courait dans l’eau. La nature a donné
à ce poisson une force et une vitesse impressionnante ; capable de
sortir 100m de ligne en quelques secondes. Et puis par son cycle de
vie, le saumon impose un certain respect ; il naît en rivière puis y
grandit pour ensuite partir en mer et partir on ne sait où. Enfin
quand il a atteint l’age de se reproduire il revient et remonte la
rivière où il est naît. Ce poisson a une part de mystère, qui le
rend peu être un peu magique aux yeux des pêcheurs. Le lendemain,
j’apprenais à pêcher sur cette minuscule rivière, accompagné de
Pierrot et de Julien. Nous sillonnons la rivière à la recherche de
gobages, mais nous ne voyions rien. A midi, on me disait alors qu’il
ne fallait pas chercher les gobages, mais les provoquer, il faut
pêcher sur les postes, deviner sur quelle veine d’eau se trouve le
poisson. C’est à ce moment que l’on voit si l’on a le « sens de
l’eau », ce sens qui nous permet de sentir où se trouve le poisson.
‘après midi je prenais mes premiers poissons dans la région, bien
d’autres allaient suivre tout au long du séjour.

Une équipe
était venue nous filmer pour faire un documentaire sur la pêche et
l’éducation. Nous passions la suite du séjour au bord de l’eau avec
eux. Ils nous filmaient en action de pêche, nous interrogeant sur ce
que la pêche à la mouche évoquait pour nous, ce qu’elle nous
apportait. Toute une réflexion !!!
Au bord de
l’eau, je cherchais souvent les truites avec P.O et aussi Julien.
J’essayais de les « guider pour prendre leur premier poisson. Ce
n’était pas facile. En effet, la rivière était encombré et lancer
dans un endroit encombré est toujours quelque chose d’assez
difficile alors pour un débutant… J’essayer de mon mieux de leur
montrer comment faire avec tous ce qui nous entoure comment se
positionner pour lancer, essayer de leur apprendre à « lire » la
rivière afin de sentir où il y avait un poisson. Apprendre à pêcher
à la mouche est quelque chose d’assez délicat, c’est peut être la
pêche la plus exigeante ; il faut tout d’abord du matériel, puis
après il y a un long apprentissage, celui du lancer ; ceci à l’air
simple, mais demandez à quelqu’un qui n’a jamais appris, de lancer
10m devant lui. Il y a presque 100% de chance que la soie et la
ligne viennent s’emmêler devant les pieds du débutant.
Julien et
Pierrot devaient donc perfectionner leur lancer. Ce que je leur
avais appris au bord de l’étang de Bury, »
PS : Depuis, Rémi qui est
l’auteur de cet article a pêché deux Saumons au Canada
